© Larouche, H. (2000).

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Préambule : Le cas est présenté par une éducatrice qui a 20 ans d'expérience et qui explique comment elle sert de lien entre l'école et les parents. L'enfant dont il est question est en maternelle et est amené à prendre une médication. L'éducatrice ressent la nécessité d'aller au devant de l'enseignante et de la direction pour faire un suivi de la médication et pendant tout ce temps, elle travaille très fort pour avoir une relation de confiance avec les parents.

TITRE: CRÉER DES LIENS

Mon récit se situe au début de l'année, quand les enfants nous arrivent. On ne les connait pas beaucoup au début, cependant il y a un enfant de maternelle, entre autres, qui est passablement agité, il est très volubile. Il parle vraiment beaucoup, on a de la difficulté à le suivre tellement il parle et il ne nous écoute pas du tout. Les semaines passent et je constate qu'il est comme cela tout le temps. Les éducatrices qui travaillent avec lui se consultent : « Simon il est comment avec vous? » Une me dit: « il parle continuellement ». « Oui c'est curieux ça ». Cela nous laisse perplexes, par contre je dois dire qu'il a un très beau langage, il prononce bien, il a un vocabulaire très riche, les mots, il les a à profusion. Il a appris cela de sa mère qui enseigne le français, il met beaucoup d'accent sur les mots, par exemple, il va dire « c'est mon baluchon », il ne dira pas son sac d'école. Il utilise les termes justes en tout temps et très accentués, il prononce bien, même s'il parle très vite.

Je l'ai le matin avant la maternelle, de 7 h 30 min à 8 h 30 min et de 10 h 30 min à une heure moins le quart; il est avec une autre éducatrice l'après-midi, car je termine à 1 heure. Après quelques semaines, je me demande comment ça va pour les autres éducatrices avec lui. Je demande à celle qui est auprès de lui l'après-midi comment il travaille. Elle me montre un de ses dessins et me dit : « Je lui avais demandé de faire un arbre et regarde ce qu'il a fait (c'était des gribouillis). Il ne fait absolument rien! Je ne suis pas capable de le faire écouter, on dirait qu'il ne nous comprend pas. Tout ce qu'il fait, c'est qu'il parle. » Un moment donné, je suis allée voir son enseignante. Je me disais, ça ne se peut pas qu'il réponde aux attentes de l'enseignante alors qu'au service de garde, il ne participe pas du tout. Je vérifie auprès de l'école, l'enseignante de la classe me dit qu'il ne fait absolument rien. Je lui ai alors demandé s'il avait été référé pour une évaluation. Elle m'a dit qu'elle voulait le faire. Mais le temps coule, on arrive à Noël et je n'entends parler de rien, l'enseignante ne me donne pas de suivi. Au service de garde, on est toujours aux prises avec l'enfant qui ne participe pas.

Simon n'est pas un enfant agressif, mais il est dérangeant dans le sens qu'il nous interpelle continuellement. Par exemple, quand les enfants arrivent de la maternelle on fait des petits jeux d'activité physique pendant une demi-heure. Simon va parler, il va m'interrompre si j'explique un jeu, il a toujours quelque chose à me raconter, il va me parler d'un malaise qu'il a eu, etc. Il ne participe pas, il est toujours en retrait en se justifiant : « Moi je suis trop fatigué, je ne fais rien. » Il est fatigué quand c'est le temps de se concentrer. Je le mets à part et je lui suggère de prendre un livre. Il va s'asseoir, il va regarder un livre, mais ça ne dure pas, il va revenir. Il recherche notre attention continuellement. Ce qui a comme conséquence de perturber le fonctionnement du groupe.

Quand il était dehors au début de l'année, Simon jouait au monstre, il faisait des bruits de dragon, juste pour faire peur. C'était son jeu de faire du bruit. C'est toujours le verbal, lui, qui est son principal instrument! Il n'est pas rejeté par les autres enfants, ils jouent avec lui, ils l'écoutent, il est accepté. Simon joue avec eux un bout de temps, mais il revient voir l'adulte et il a toujours quelque chose à raconter. S'il joue dans le coin de poupées, il fait des personnages. Il accepte l'idée d'un autre dans la mesure où ça lui convient. Il n'a pas de problème au niveau des interactions, mais il n'aime aucun jeu qui exige de la motricité fine: blocs Légo, construction, dessin ou pâte à modeler. À l'école, c'est la même chose semble-t-il, il parle tellement qu'il n'arrive pas à se concentrer sur ce qu'il a à faire. Quand j'explique un jeu, il ne participe pas, il parle d'un autre jeu qu'il connaît. Si c'est le temps de se laver les mains avant le diner, il essaie d'avoir notre attention, pas en faisant des mauvais coups, mais en parlant tout le temps. Pour le dîner, on fait une petite accalmie avant de commencer le repas, durant cette petite période de silence, il va me parler « Marcelle sais-tu ce que j'ai pour dessert? » Je lui réponds : « Non Simon on verra cela tout à l'heure ». C'est comme cela tout le temps. Pour dîner, il est très lent, il finit toujours après les autres. Il mange très peu, il n'a pas beaucoup d'appétit. On lui dit : « Mange Simon, c'est le temps de manger, tu parleras après ». Habituellement, quand il voit que les autres on finit, il remet tout cela dans son sac. Alors, il arrive régulièrement chez lui avec des dîners à moitié terminés.

Je dois dire que jamais on a à punir cet enfant, il va être où il doit être, mais en ne faisant pas ce qu'il a à faire. Il invoque souvent l'idée qu'il est fatigué quand on exige de lui un travail. Un autre trait de caractère, il est très tenace quand je parle avec quelqu'un, il m'interrompt tant que je ne lui ai pas répondu. Je lui dis : « Attends, je suis occupée » mais non, c'est: « Marcelle, Marcelle, Marcelle... » Je continue à parler et quand j'ai terminé, je l'écoute. Alors, il s'empresse de parler avec beaucoup de volubilité, il est tellement pressé de dire ce qu'il veut dire. On dirait que parler pour lui c'est un besoin aussi important que de respirer. Si tu portes ton attention et l'écoutes, ça devient interminable! À la longue on a fini par dire : « oui Simon, oui Simon, mais là c'est le temps de... » On répète deux ou trois fois et il va finir par obéir. D'autres fois, on élève presque le ton: « Simon c'est la dernière fois que je te le dis: cesse de parler! » Il n'y a pas un éducateur qui ne lui a pas dit « Simon tu te tais ». On ne l'écoute plus, on n'avait plus d'autre alternative que celle-là, parce qu'on était toujours aux prises avec la même difficulté. On a développé une attitude passive : on ne réagissait plus.

Nous, au service de garde, on est conscient que Simon a un problème. Au mois de février, le père arrive un matin et il est très sérieux. Comme d'habitude, je m'adresse à l'enfant : « Bonjour ça va bien Simon? »

-Le père répond: Simon doit prendre des vitamines.

-Je suis surprise : ah oui?

-Il faudrait qu'il en prenne le matin et le midi.

-Ah bon?!

-Et tout de suite Simon reprend (c'est sûr qu'il ne laissera pas passer une occasion de parler): oui, oui Marcelle, j'ai des vitamines.

Le père me donne la bouteille, je réalise que ce ne sont pas des vitamines, alors je demande à Simon de se retirer. Le père me dit : « On est obligé de donner du Ritalin à Simon. J'ai consulté trois neurologues et je n'ai pas le choix. Ma femme est déconcertée! » C'est une catastrophe pour les parents! On le sent extrêmement déçu. J'essaie de dédramatiser la situation : « Bon, la posologie est sur la bouteille, une le matin à la maison, une autre le midi au service de garde ».

-Le père reprend : « C'est un essai pour un mois. Pour Simon, on lui a dit qu'il prenait des vitamines. Si possible, lui donner avec réserve, sans que ce soit trop apparent. (Il avait avec lui une grande enveloppe scellée sur laquelle était inscrit « personnel ».) Dans cette enveloppe il y a la consigne pour la direction, pour l'école et pour le service de garde. Je ne l'ai pas ouverte, je l'ai mise sur le bureau de la responsable. Ce que j'ai appris le matin même par le parent m'intrigue et je souhaite pouvoir en parler avec son enseignante le midi. Je me demande si l'information s'est rendue aux personnes concernées. Je vais chercher les enfants à 10 heures 30 et je demande à l'enseignante:

-Est-ce que tu as eu un message de la direction?

-Oui, j'ai eu un message concernant Simon.

-Comment est-ce que ça a été ce matin?

-Je ne l'ai pas reconnu! Je pensais qu'il était malade. Quand j'ai vu l'enveloppe, j'ai compris.

-Alors tu es au courant, on va suivre son comportement.

Le midi on donne du Ritalin à Simon. On ne le reconnaît plus : il est beaucoup plus calme dès la première journée. Je laisse aller les choses et je n'entends plus parler de rien. Je me demande qui va prendre l'initiative du suivi. Est-ce que c'est l'enseignante qui va appeler le parent, ou est-ce que c'est la direction qui va le faire? D'un autre côté, je me demandais si j'avais une initiative à prendre. Quel est mon rôle? Après une semaine, quinze jours, ça me fatigue et comme je réalise qu'il ne se passe rien, qu'il n'y a pas personne qui s'informe, je décide de consulter l'enseignante:

-Comment ça va, Simon?

-Ça va bien! Je réussis à faire telle et telle chose...

-Est-ce que tu as vu le parent?

-Non je n'ai pas vu le parent.

-Bon moi je vois le parent tous les matins et je vais lui faire un suivi du comportement de Simon.

Le matin suivant, j'en parle au parent et je lui dis :

-On réalise qu'il y a du progrès. L'enseignante m'a dit que ça allait beaucoup mieux. Au niveau de l'éducatrice l'après-midi c'est également beaucoup plus satisfaisant. Et en ce qui me concerne, il est moins volubile et je le sens beaucoup plus calme.

-Je suis bien content de savoir cela.

-On continue donc avec le médicament.

Le temps passe. On est rendu à trois semaines quand Simon arrive un lundi matin empâté, endormi. Je sais qu'il ne prend pas de médicament la fin de semaine. Simon est au ralenti, il ne parle presque pas, il se déshabille et il s'assoit dans un coin sans dire un mot. Je prends note de son état et il s'en va à l'école. À 10 heures 30, je vois l'enseignante et je lui demande:

-Comment il va, Simon?

-C'est drôle il a dont bien l'air endormi. Nous nous sommes interrogées: aurait-il a une médication trop forte?

Le lendemain, même phénomène, trois jours passent comme cela. Je dis à l'enseignante:

-Ce n'est pas normal! Trouves-tu que Simon a l'air drôle?!

-Franchement, je pense que la dose est trop forte.

-Ça me fait cet effet-là moi aussi. Alors qu'est-ce qu'on fait?

-Il faudrait peut-être diminuer sa dose?

-Je vais voir le parent demain matin et je vais lui en parler.

Alors on est les deux, elle et moi, qui décidons de diminuer la dose de Ritalin à Simon. Le lendemain, je vois le parent et je lui dis:

-As-tu remarqué depuis quelques jours Simon a l'air ralenti? Penses-tu qu'on devrait diminuer la pilule du matin?

-Bien, oui c'est possible. On serait bien content de diminuer la dose.

-Donnez-lui en une demie le matin et nous on continue avec une le midi, on va voir, essayons cela pendant une semaine. Au bout d'une semaine, on évaluera son état.

Il est tout à fait d'accord, il est très content même. Après deux jours, le père me dit : « Ça paraît parce que le soir il a beaucoup moins de difficulté à s'endormir. Je suis bien content. » Le père avait observé une perte d'appétit. Moi aussi, je l'avais observé, mais c'est une réaction normale apparemment; une perte d'appétit, des maux de tête, de la difficulté à s'endormir, ce sont les effets secondaires du Ritalin. Le père est très satisfait qu'on ait diminué la dose. « S'il y avait possibilité de diminuer celle du midi, ça serait bien aussi » dit-il. Je lui réponds : « On va essayer celle du matin, après une semaine on verra. »

Au bout d'une semaine, je consulte l'enseignante qui me dit:

-C'est beaucoup mieux. On laisse cela de même, il est moins endormi, il répond mieux, puis il arrive même à se concentrer, c'est bien, il fait du bon travail. Il répond mieux à mes attentes, il n'a plus l'excuse de la fatigue. (Quant à moi, l'excuse de la fatigue je pense que c'était pour se dérober). À la suite du souhait exprimé par le père pour diminuer celle du dîner, je consulte les éducatrices de l'après-midi et elles me disent:

-Non, non il n'en est pas question, rendu à trois heures, il n'est plus de service, il revient à la normale! Il n'y a plus d'effet rendu à trois heures, alors on laisse cela de même.

Je revois l'enseignante et l'informe qu'il n'est pas nécessaire d'apporter d'autres changements pour le moment. Je fais aussi le suivi au parent.

J'ai servi de lien entre les parents et l'école, car il n'y avait pas de communication. Le parent ne s'informe pas et l'enseignante ne va pas plus loin que moi. Et si je ne l'avais pas demandé, je pense qu'il n'y aurait pas eu de suivi. Les parents me font confiance, ils se fient sur moi. Je considère que ce sont des parents très bien, des parents qui sont très à l'écoute de l'enfant, mais ils sont aussi à notre écoute. J'ai toujours eu une très bonne relation avec ces parents-là. J'ai pu gagner la confiance de la mère. C'est une personne qui n'est pas facile d'approche. J'ai assez de facilité à entrer en communication avec elle. En étant consciente qu'elle est centrée sur son enfant, j'ai toujours une réflexion positive face à l'enfant. Par exemple, en lui disant que Simon a un langage remarquable. On sent qu'elle est fière. Des fois, c'est dans des attitudes comme cela que tu vas chercher le parent. Après cela, le parent te fait confiance. Je pense que l'accueil avec les enfants face aux parents ça a aussi son importance, il faut être assez réceptive. Tu accueilles l'enfant, mais tu accueilles le parent aussi. Il faut qu'il sente que tu voies son enfant comme lui le voit, que tu l'acceptes. Ce n'est pas un accueil indifférent, si tu es dans le fond de la pièce tu t'en viens vers lui. Le parent sent que tu n'es pas indifférente à son enfant. Avant de faire une remarque négative concernant un enfant, tu dois créer un lien avec le parent. Si tu ne fais pas cela, ça ne passera jamais ou ça va passer très mal. Certains parents sont trop pressés, tu n'es pas capable de créer de lien, ils ne sont pas prêts à accepter une remarque. Il y a des parents avec lesquels tu n'investis pas parce qu'ils ne veulent pas. Ils ne collaborent pas, ça ne donne rien de dépenser de l'énergie. Je suis prête à investir avec les parents qui acceptent de collaborer.

Pour créer un lien avec les parents, il faut que tu t'intéresses à eux, sans être indiscret bien sûr. Par exemple, pour la mère de Simon, j'ai su par l'entremise d'une éducatrice qu'elle était très sévère sur le langage des éducatrices. C'est une femme qui est très polie, qui a quand même un beau sourire, qui est bien à sa place. Un moment donné je me suis posée une interrogation sur un mot, comment on devait le prononcer, alors j'ai profité d'une occasion pour lui demander comment le prononcer correctement. C'était une belle occasion de rapprochement. Je me disais : ça va peut-être nous aider toutes les deux le fait que je lui demande un conseil; une façon d'établir un climat de confiance entre nous. Je pense que ça a été un bon moyen, j'ai senti qu'elle était contente de répondre. Après cela on a pu aller plus loin dans des petits échanges, c'était plus facile de se parler. Tu sens que le geste d'humilité que tu as fait, ça t'a donné beaucoup. Il faut saisir les occasions qui se présentent pour établir des liens plus solides. On peut provoquer les occasions aussi, comme moi quand ils m'ont dit qu'elle était professeure de français. J'aurais pu ne pas lui demander, je n'étais pas obligée, j'avais juste à prendre le dictionnaire, mais je sentais que si je faisais cela, ce serait un « plus » pour nous deux. Ça créerait davantage un lien. Je n'ai jamais eu de difficulté avec les parents pour leur dire ce que je voulais, parce que j'ai toujours attendu d'avoir créé des liens avant. Tu le sens quand il t'accepte le parent, il vient vers toi, il va te dire des choses. Tu le sens par les échanges qui se font, par l'attitude du parent; comme la mère de Simon qui arrive toujours avec un beau « bonjour Marcelle! »

Au début le parent ne nous connaît pas, l'image que tu projettes peut être différente selon chaque personne. Alors, c'est à toi à te faire accepter. Il faut apprivoiser les parents, j'essaie de voir où sont les forces de la personne. C'est sûr que les éducatrices me disaient : « ils sont centrés sur cet enfant-là, ils ne sont pas capables d'en entendre parler d'une façon négative. » Il ne faut pas penser que la première fois que j'ai fait une observation sur Simon, je n'ai pas pesé mes mots! Quand tu sens que le parent a envie de se raidir un petit peu, alors on en a assez dit. La première fois que j'ai fait une observation, j'ai eu l'impression qu'ils ne voulaient pas en entendre parler, je me suis dit: on va attendre. Une fois que le lien est créé, que la confiance règne, tu peux te permettre de dire beaucoup de choses. Mais encore là, il y a une façon de le dire, il ne faut jamais briser le lien, jamais! Il faut toujours y aller en douce, il ne faut jamais oublier que tu parles de son enfant. Ça, c'est une chose que j'ai toujours en tête! Parler à un parent de SON enfant, c'est comme si tu parlais de lui, il faut y aller avec prudence. Pour être capable de faire une observation négative, il faut que le parent ait confiance en toi, il faut qu'il y ait quelque chose qui existe entre vous deux.

Quand le père m'a annoncé pour le Ritalin, j'ai senti qu'il avait un malaise, parce qu'ils ne l'acceptaient pas. Quand je parle du lien, c'est important parce que tu es réceptif quand il existe un lien entre les personnes. Moi, j'ai senti le malaise de ce père quand il m'a dit : « sa mère ne le prend pas, elle est pire que moi », c'était facile à voir que lui non plus ne le prenait pas! On n'avait pas le goût ni un ni l'autre d'en parler, parce que ce n'était pas le temps. Il fallait leur laisser du temps.

Il reste que moi je donne du Ritalin à un enfant sans être trop informée. Il y a sûrement eu un échange entre le parent et l'enseignante pour qu'on décide de donner du Ritalin à Simon. Dans mon cas, j'ai reçu les informations comme une exécutante. Ce n'est pas moi qui ai pris cette initiative, on ne m'a pas consultée là-dessus. On arrive un moment donné avec un acte à accomplir sans qu'on sache trop ce qui a été décidé, sans être consulté, puis c'est moi qui dois poser le geste. J'ai su par l'enveloppe qu'on m'a remise, que la direction avait été informée de cette démarche-là. On m'a utilisée, mais pas plus, c'est comme si on me disait : « fais cela et ne te pose pas de questions ». Si je n'avais pas été là, d'abord pour la constatation qui s'est fait que l'enfant en avait trop, mais aussi, si on n'avait pas passé par moi, qu'est-ce qu'on aurait fait? Il y a 20 ans, quand il n'y avait pas de garderie dans les écoles, comment ça se passait avec les enfants en difficulté? On est le lien entre l'école et la famille. S'il n'y avait pas de garderie dans les écoles, je me dis le directeur aurait du boulot! C'est pour cela qu'il faut être à l'écoute. Si tu es présent et que le parent te fait confiance automatiquement il va se confier. C'est important qu'on soit en contact avec les parents et qu'on aille assez loin dans le cas d'enfants en difficulté. L'échange avec le parent, ça nous aide à accepter l'enfant et à le comprendre. Le parent nous donne des indices et c'est réciproque.

Ce que j'ai apprécié dans cette situation, c'est d'avoir pu établir un contact avec le parent. Où j'en souffre un peu, c'est peut-être au niveau de la discussion, du plan d'intervention qui s'est fait. J'aurais aimé être impliquée là-dedans parce qu'il me semble que j'aurais pu en retirer quelque chose et en donner aussi. Je trouve qu'il y a une carence à ce niveau. Ce qui m'a aidée, c'est que j'ai pu maintenir un contact avec les parents, je pouvais aller chercher ce dont j'avais besoin pour travailler, pour accepter et comprendre Simon. Mais c'est sûr qu'il y a une faille à quelque part. S'il y a un plan d'intervention qui se fait au niveau de l'école, pourquoi ne serait-on pas impliqué nous aussi? Avant qu'on décide de donner du Ritalin à Simon, j'aurais aimé qu'on soit consulté. Pour moi, la garderie dans l'école a servi à faire un lien entre le parent et l'enseignante, c'est la perception que j'en ai à partir de l'expérience que j'ai vécue. Dans un premier temps, c'est d'être là pour l'enfant, mais pour répondre vraiment aux besoins de l'enfant, il faut qu'on aille chercher le parent. De plus en plus, on a des enfants qui ont des besoins particuliers, là-dessus on peut en sauver, mais il y en a qu'on ne sauve pas. Je pense que les garderies dans les écoles devraient répondre en ce sens, il faut aller au-delà du service des diners et des activités en après-midi. Ou encore si un enfant a un comportement inacceptable, on le met à la porte, il faut aller plus loin que cela, sinon tu fais un travail de « parking ». J'ai le sentiment que je suis là pour quelque chose quand il y a des enfants qui ont des besoins, comme Simon, et qu'on a réussi à les aider.